La « responsabilité » de l’écrivain, comme celle de l’éditeur, possède une longue histoire faite de luttes pour défendre l’autonomie de la création contre tous les pouvoirs (Gisèle Sapiro). Ce récit sinueux des relations de la censure, de l’édition et du pouvoir, dont on imagine mal qu’il puisse avoir une conclusion, est aussi celui d’une « histoire du silence » (Jean-Yves Mollier).
Les années qui suivent la Seconde Guerre mondiale ouvrent une autre époque pour l’édition généraliste française qui, avec des nouveaux venus, des nouveaux publics, des nouveaux genres éditoriaux et une concurrence accrue, se recompose. Sous une forme inédite, l’État renforce alors son contrôle direct sur les livres. Au nom de « la » morale, pensée comme une essence, certaines œuvres jugées choquantes sont socialement disqualifiées.